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Kolkata jour 31

(3 mars 2018)

 

Hai tutti !

 

Mais quelle journée compliquée pour moi... Je me suis réveillée avec un tour de cou pas possible. J'ai dû dormir dans une mauvaise position et du coup, je suis incapable de tourner la tête sur la gauche. Et j'ai l'épaule gauche qui me fait mal en plus.

 

Je mets juste un peu de gel musculaire car je ne voulais pas prendre de médicaments trop puissants car ils font dormir. Et notre journée va être chargée.

 

Je vous avais dit que j'avais fait des recherches pour essayer de trouver le bidonville du film "La Cité de la Joie" mais je ne l'ai pas trouvé. J'ai regardé le film aussi pour essayer de repérer l'endroit mais mon sens de l'orientation inexistant ne m'a pas aidé non plus. Et puis un film, reste un film...

 

J'ai fini par demander à Allan s'il savait où il se trouvait. Il habite à Kolkata depuis toujours et en quelques secondes il me dit que le bidonville s'appelle Mothijhil et qu'il n'est pas loin de Convent Lane. En taxi nous y serons en 15 minutes. Kanta et Audrey se joignent à nous.

 

Nous nous donnons rendez-vous devant notre hôtel et partons pour Convent Lane. Je n'ai pas dit au chauffeur de taxi que nous allions précisément à Mothijhil car je trouvais cela un peu "malsain" de dire que nous souhaitions visiter un bidonville. Je n'aime pas non plus le terme "visiter" car chez nous, tu ne visiterais pas les habitations des gens comme cela. Et nous n'y allions pas pour voir la misère des gens ou par voyeurisme mais bien parce que Kolkata, ce n'est pas uniquement Chandra Bose Road avec des commerçants au sourire magnifique mais c'est aussi une ville dont les conditions de vie pour certaines personnes sont vraiment différentes.

 

Le trajet effectivement est très court mais nous ne sommes pas à l'entrée du bidonville en question. Je finis par dire le nom du slum (bidonville) et je vois à la tête du chauffeur de taxi qu'il ne comprend pas pourquoi quatre touristes veulent aller là bas. Il finit par demander son chemin à plusieurs personnes. Il oublie une fois de mettre son frein à main et c'est Laurent qui doit appuyer sur la pédale en attendant son retour, car nous ne voyons pas de frein à main. Il finit par nous déposer juste devant.

 

Nous descendons et arpentons les petites rues qui forment le bidonville. Les gens sont curieux de nous voir, ils suivent Laurent pour qu'il les prenne en photo, les enfants marchent derrière nous ou en vélo. Laurent mitraille comme à son habitude, Kanta et Audrey aussi. Je me sens d'un coup plus très à l'aise d'être là. Nous avons l'air de paparazzis ou de voyeurs mais dans le mauvais sens du terme. Et mon impression avait l'air d'être la bonne pour certaines personnes en tout cas.

 

Une femme devant sa maison nous voit au loin et je suis la première à arriver à sa hauteur. Elle me parle de suite en bengali. Comme tous les indiens depuis que je suis ici d'ailleurs. Le ton monte. Je sens à sa manière de me parler que nous n'avons pas à être là, que nos photos sont malvenues et elle me fait signe de la main de partir. Sa fille ou connaissance qui est juste à côté me fait des yeux noirs aussi.

 

J'essaie d'expliquer aux autres que je ne suis pas sûre que cela soit bien que nous nous baladions ici, mais eux à l'inverse, ont les enfants et les jeunes adultes qui adorent nous regarder, veulent des photos et encore des photos. On devient l'attraction de la journée.

 

Je marche devant et lentement car j'ai toujours mal à la nuque. Cela me prend plus de temps pour me déplacer. Je vois un enfant qui est en train de remplir des bidons d'eau à la pompe. Sa mère vient les chercher au fur et à mesure qu'ils sont remplis. Ce bidonville est un mini village. Il y a des petites échoppes comme partout, mais aussi une fabrique de porte-monnaie en cuir. Les hommes qui y travaillent sont assis par terre avec des milliers de porte-monnaie autour d'eux. Ils finissent les découpes puis prennent un gros pot de peinture style néoprène et commencent à assembler les dernières pièces de l'objet en question. Je reconnais l'odeur de la colle. Sauf que je me dis que cela doit être très difficile de faire cela toute la journée dans cette toute petite maison, où il fait chaud, avec ces vapeurs nocives qui se dégagent. Un peu plus loin, il y a une fabrique de cuir ou du moins des hommes découpent des pièces de cuir. Peut-être qu'ils travaillent en collaboration.

 

Il y a une placette où les enfants jouent au criquet avec des bouts de bois et une balle en plastique, une autre où les femmes lavent et étendent leur linge. C'est toujours beau de voir toutes ces couleurs qui flottent dans le vent. Chaque rue débouche sur de toutes petites ruelles étroites. Certaines ne sont que des impasses avec des tonnes de détritus et d'autres sont des habitations où les personnes se calfeutrent un peu à cause de la chaleur. Nous croisons un cabinet de docteur avec deux petits garçons qui attendent leur consultation.

 

Nous voyons plusieurs fois des hommes jouer au carambole dans des espèces de huttes bien au frais, des ados sur leur scooter avec leur portable qui veulent que tu les prennes en photo dans des postures de djeun's !

 

Certains veulent devenir ton guide et te disent où aller et quoi photographier. Ils sont parfois un peu pot de colle. L'architecture est très variée. On peut voir autant de maison faite en bambou avec des tissus déchirés en guise de cloison et d'autres qui ont une vraie charpente et des portes absolument sublimes. J'adore leurs portes. Une grande partie sont colorées et font très vieilles et sales. Cela leur donne beaucoup de cachet.

 

Au bout d'une rue, il y a cinq ou six hommes assis par terre en train de jouer aux cartes. Nous pensons être arrivés à la fin du slum et non pas du tout. La rue continue. Nous passons devant une clinique qui dispense différents soins. Toutes les informations de base sont peintes sur la porte. Nous croisons beaucoup d'écolières en uniformes mais je ne repère pas l'école. Effectivement, les fillettes arrivent depuis l'extérieur du bidonville.

 

Il y a des affiches sur les murs. On peut y lire qu'il y a des cours d'anglais qui sont proposés ou qu'il est possible de donner de son sang non loin de là.

 

Une famille veut qu'Audrey aille dans leur maison pour voir leur bébé et qu'elle leur donne de l'argent. Puis c'est un homme qui veut qu'elle aille visiter où il habite. Elle refuse dans les deux cas évidemment.

 

Il fait très chaud et je suis fatiguée. Il n'y a pas vraiment d'air qui passe et cela devient un peu étouffant. De plus, les endroits pour se poser sont presque inexistants. Nous achetons de l'eau et des biscuits pour les enfants. Je profite qu'il y ait des tabourets devant un magasin de bijoux pour m'asseoir quelques minutes. Le vendeur me montre de super beaux bijoux comme toujours et Laurent en profite pour faire la distribution de ses biscuits.

 

En plein milieu du bidonville, il y a une décharge à ciel ouvert avec des taxis, vélos et rickshaws perdus là au milieu. Puis juste à côté, tu vois un magnifique arbre qui pousse devant une grande maison. Des chèvres vivent paisiblement au milieu de tout ce joyeux bordel. Certaines sont même "habillées".

 

Les femmes jettent leurs déchets dans la rue alors qu'il y a des poubelles vertes avec le slogan "Kolkata green". Des hommes sont en train de se laver. Ils portent des pagnes (grand tissu qu'ils se nouent autour de la taille). Un peu plus loin nous voyons comme une entrée de temple. Tout est fleuri et en fait c'est un magasin qui propose leurs services pour décorer l'intérieur et l'extérieur de chez toi le jour de ton mariage.

 

Dans la ruelle à côté, il y a comme une espèce de mosquée au loin. Nous nous approchons et nous voyons un cercueil recouvert de fleurs.

 

Je m'étais préparée à vivre cette journée car j'imaginais que cela serait vraiment difficile de me déplacer parmi les détritus, les odeurs, les rues étroites et encombrées. Depuis que je suis en Inde, je ne suis pas tombée une seule fois, même pas trébuché. Je pensais qu'aujourd'hui serait peut-être cette première fois. Et en fait, cela a été tout différent. Les rues sont sales, certes, mais c'était pas aussi compliqué que cela. Les odeurs étaient moins prenantes que dans le premier bidonville que nous avions visité seuls Laurent et moi.

 

Au sol, nous voyons encore des pigments de la fête de l'Holi, les enfants sont encore un peu barbouillés et un joli "Happy Holi" écrit à la craie nous donne envie de continuer la rue. J'aperçois une dizaine de rickshaws à l'abandon au milieu d'une placette, des femmes tiennent un petit restaurant de rue et des enfants vendent du tchai. Ils portent leurs petits gobelets d'une main et leur verre en métal brûlant de ce délicieux breuvage dans l'autre. Nous croisons un vendeur de citrons verts qui a accordé sa chemise à ses fruits.

 

Devant l'entrée du slum, il y a une scène qui est installée (c'était sans doute pour la fête de l'Holi) et un son assourdissant et saturé passe dans les enceintes. Nous quittons le slum et prenons la route principale pour trouver un taxi.

Une fois de plus il ne sait pas où l'on doit aller, nous perdons un temps fou à rentrer à l'hôtel. Nous ne bougerons plus de la soirée.

 

Voilà c'était le récit de la journée, certes un peu décousu car j'ai rassemblé mes souvenirs au fur et à mesure qu'ils me revenaient en tête et non suivant l'ordre de notre visite...

 

A demain !

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